Bony : condamnés pour avoir corrigé leur fille
Dépassés par le comportement de leur fille de 14 ans, une mère lui a collé une paire de gifles et le beau-père a usé de la force pour la faire sortir de voiture à Bony près du Catelet. Ils ont été condamnés à de la prison avec sursis.
Lætitia* vient d’avoir 15 ans. L’âge bête, diront certains. Ce n’est sans doute pas sa mère qui dira le contraire tant la jeune fille s’est montrée difficile à gérer ces derniers mois. Une période rebelle aggravée par les relations compliquées qu’elle entretient avec son beau-père. Cas de figure classique de bon nombre de familles françaises. Sauf que rares sont les crises d’adolescence qui se terminent devant un tribunal correctionnel.
Les choses ont dégénéré le 15 juin 2014. Lætitia passe la soirée chez sa tante. C’est la fête du village et la jeune fille compte bien s’y rendre. Vers 23 heures, sa maman reçoit un coup de fil affolé de sa sœur. Lætitia a disparu. Elle serait partie avec un garçon en voiture dans un chemin de terre. Elle aurait aussi bu de l’alcool. Cette fois elle est allée trop loin.
Après de longues minutes d’inquiétudes, l’adolescente est récupérée. Pas d’effusion de joie de la part de la mère mais une bonne paire de claques qui lui ont valu ces poursuites en justice. Là dessus, le procureur se montre compréhensif. « Je pense que ce n’était pas la bonne réponse, mais que ce soit la réponse d’un parent furieux, inquiet, je veux bien l’entendre. Que ça ne relève pas du pénal, je veux bien l’entendre aussi», a estimé Damien Savarzeix.
« Doit-on condamner une mère pour un aller-retour ? »
Ce dernier s’est montré moins concilient avec le beau-père, absent au procès. Car après être montée dans la voiture, Lætitia, boudeuse, a refusé d’en descendre une fois rentrée chez elle à Bony. Le compagnon de sa mère l’a alors agrippé par le bras pour la faire sortir. Selon la version de la demoiselle, il l’aurait ensuite projeté contre le toboggan de la cour lui occasionnant quelques contusions.
La mère n’a pas la même interprétation. « En descendant, elle s’est empiergée et elle est tombée». Elle assure aussi que son époux n’a fait que l’accompagner pour sortir de l’habitacle. « Comment osez-vous, alors qu’elle est dans cet état-là, (allusion au certificat médical) nous soutenir que votre mari l’a aidé à sortir gentiment du véhicule ?» s’est emporté le procureur. Représentant les intérêts de l’enfant pour le conseil général, Me Philippe Vignon en a profité pour rappeler « que la violence n’est pas une réponse éducative».
Mais pour la défense, il y a « des doutes sérieux » sur la version de l’adolescente.
Quinze jour et un mois avec sursis
Surtout, cette affaire familiale n’a peut-être pas sa place dans un tribunal. « Doit-on poursuivre en justice et déclarer coupable de violences une mère de famille qui colle un aller-retour à sa fille qui est partie, qui a bu et qu’on a cherché pendant des heures ?» s’interroge Me Olivier Hourdin.
Le parquet en doute aussi. Le procureur n’a rien requis contre la maman mais a demandé de déclarer coupable le beau-père. Les juges ont tranché en condamnant le couple. La mère a été punie de quinze jours d’emprisonnement avec sursis. Son mari écope d’un mois avec sursis.
Depuis les faits, Laëtitia est placée dans une famille d’accueil. « Elle demande à revenir. Ça va mieux », conclut sa mère.
*prénom d’emprunt
Source : L’Aisne Nouvelle